III. Un balcon en forêt noire
3 – 1 Un loup à une jambe
Suivant un aigle, ils se sont perdus dans une forêt noire.
— Ici, il fait sombre même en plein jour, dit Sollaire.
— Il fait noir comme dans la gueule du loup.
J’ai peur. Comment faire ?
LUNAIRE se met à pleurer comme une fontaine.
Effrayés, ils se regardent l’un l’autre.
Brusquement, un monstre à une jambe,
est apparu à pas de loup, en coulant la bave de sa gueule.
C’est un grand méchant loup.
— LUNARE, on se sauve ! crie SOLAIRE.
Ils se mettent à courir tout ensemble.
— SOLAIRE, SOLAIRE, au secours ! crie LUNARE.
— LUNAIRE, va-t-en ! crie SOLAIRE.
LUNAIRE se déguise en cerf.
Étant unis, ils se sont séparés l’un à l’autre pour la première fois
et se sont perdus dans la forêt noire en taillis.
««« Énorme, immobile, assis sur son train de derrière,
il était là regardant la petite chèvre blanche
et la dégustant par avance.
Comme il savait bien qu’il la mangerait, le loup ne se pressait pas ;
seulement, quand elle se retourna, il se mit à rire méchamment.
— Ha ! ha ! la petite chèvre de M. Seguin !
et il passa sa grosse langue rouge sur ses babines d’amadou.
Blanquette se sentit perdue…
Un moment en se rappelant l’histoire de la vieille Renaude,
qui s’était battue toute la nuit pour être mangée le matin,
elle se dit qu’il vaudrait peut-être mieux se laisser
manger tout de suite ;
puis, s’étant ravisée, elle tomba en garde,
la tête basse et la corne en avant,
comme une brave chèvre de M. Seguin qu’elle était…
Non pas qu’elle eût l’espoir de tuer le loup,
les chèvres ne tuent pas les loups, mais seulement pour voir
si elle pourrait tenir aussi longtemps que la Renaude…
Alors le monstre s’avança,
et les petites cornes entrèrent en danse.
Ah ! la brave chevrette, comme elle y allait de bon cœur !
Plus de dix fois, elle força le loup à reculer
pour reprendre haleine.
Pendant ces trêves d’une minute,
la gourmande cueillait en hâte encore un brin de sa chère herbe ;
puis elle retournait au combat, la bouche pleine…
Cela dura toute la nuit.
De temps en temps la chèvre de M. Seguin regardait les étoiles
danser dans le ciel clair, et elle se disait :
— Oh ! pourvu que je tienne jusqu’à l’aube…
L’une après l’autre, les étoiles s’éteignirent.
Blanquette redoubla de coups de cornes,
le loup de coups de dents…
Une lueur pâle parut dans l’horizon…
Le chant d’un coq enroué monta d’une métairie.
— Enfin !
dit la pauvre bête, qui n’attendait plus que le jour pour mourir ;
et elle s’allongea par terre dans sa belle fourrure blanche
toute tachée de sang…
Alors le loup se jeta sur la petite chèvre et la mangea. »»»
* La petite chèvre de M.Seguin de Alphonse Daudet 1866
3 – 2 Un marais
SOLAIRE, épuisé de fatigue,
s’endormait d’un sommeil de plomb…………….
&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
En demi-rêve
SOLAIRE, il a failli se noyer dans un marais.
Un pas de plus, et il serait tombé dans l’eau.
Le prenant par le bras, le père serre SOLAIRE dans ses bras.
« ——- Mon petit, pourquoi puis-je t’abandonner, mon enfant ?
SOLAIRE se jette dans les bras de son père.
— Mon père, j’avais tellement peur. ——- Mon petit Solaire,
il faut que tu viennes me voir au château avec Lunaire. »
SOLAIRE se met à s’endormir profondément.
&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
— Dites donc, réveille-toi.
Un lapin tout blanc éblouissant chuchote à l’oreille de SOLAIRE.
— Dépêchons-nous ! Le soleil se lève bientôt,
dit le lapin.
— Toi, tu sais parler ? Mon petit lapin, tu es un amour,
lui demande SOLAIRE.
LAPIN avec les yeux bleus très grands comme la mer,
il lui indique le chemin qui conduit à la Place vers la Mer.
3 – 3 Une primerose
LUNAIRE, toute seule,
continue à s’enfuir en courant dans une forêt dangereuse
et finit par arriver aux champs.
Paresseuse, elle y fait un sommeil sur un tapis vert d’herbe.
&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
En demi-rêve
Le père attire LUNAIRE dans ses bras pour la serrer.
« ——- Ma petite Lunaire.
LUNAIRE, fatiguée, se jette dans les bras de son père.
— Mon père, vous avez une bonne odeur comme la terre……….
je suis toute seule sans Solaire, je …… je ……
Je te donnerai une primerose bleue.
——- Ma petite Lunaire,
il faut que tu viennes me voir au château avec Solaire. »
« Tendez l’oreille.
On entendra l’orage du printemps faire ses défilés de triomphe,
menant des soldats de dent-de-lion qui dansent au vent. »
LUNAIRE se met à dormir profondément dans les bras de son père.
&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
3 – 4 Un vieux puits
« Et soudain, la pluie d’été nous attrape et nous rend anxieux.
Tremblées aux vents, mouillés par la pluie,
nous avons perdu le chemin pour le Neverland. »
SOLAIRE entend LUNAIRE chanter toute seule quelque part ailleurs.
A la place, SOLAIRE trouve LUNAIRE assise à côté d’un vieux puits
dont l’eau reflète la pleine lune du soir.
— Où étais-tu !
— Où étais-tu ! Te voilà enfin.
Ils crient en même temps.
— Je l’ai échappé belle.
— J’ai failli te perdre.
Ils puisent de l’eau au puits pour en boire.
Au fond du puits, la pleine lune brille de tout son éclat doux.
— Tiens ! deux lunes tout à fait mêmes comme nous,
dit LUNAIRE.
— J’ai rencontré notre père en rêve, dit SOLAIRE.
— Moi aussi en rêve. Dépêchons-nous au château !
LUNAIRE suggère.
— Tiens ! un grand arbre se voit au loin, dit SOLAIRE.
— Beaucoup plus grand et beau que les autres, dit LUNAIRE.
— Sans aucun doute, nous pouvons sortir de cette forêt affreuse,
dit SOLAIRE.
Ils repartent tous les deux la main dans la main,
en visant au grand arbre.
Mais en effet, en trois avec leur cher LAPIN.
Bonbori ( Le chandelier ) Un jeu de labyrinthe